21 septembre 2011

La guerre est déclarée

Justifier les moyens

Le film est sorti le 31 août et nous venons d'apprendre qu'il représenterait la France aux Oscars. La critique vient un peu tard, peut-être. C'est qu'il m'a fallu du temps pour me résoudre à aller voir, avec l'esprit le plus ouvert possible, un film dont je ne pouvais pas m'empêcher de me méfier. Pourquoi ? Avant d'aller plus loin, examinons ensemble la fiche technique.

Titre : La guerre est déclarée
Sortie : 31 août 2011
Réalisation : Valérie Donzelli (= la "vraie" maman de l'histoire)
Scénario : Valérie Donzelli & Jérémie Elkaïm (= la "vraie" maman + le "vrai" papa de l'histoire)
La Maman et le Papa : Valérie Donzelli & Jérémie Elkaïm (vous avez compris où je voulais en venir)

Pour mémoire, Valérie faisait aussi le maquillage et la coiffure, entre deux prises. Bon. La dernière fois qu'une actrice en avait fait autant, c'était Julie Delpy dans La Comtesse. De notre humble avis, c'était raté, et nous irons même jusqu'à prédire, avec une désinvolture des plus contraires à nos principes, que la rechute sera pire que la maladie.


Voilà pour les mauvaises langues. Plus sérieusement : aux prises avec le buzz qui se crée lentement mais sûrement autour de son film, Valérie Donzelli s'en tient à un discours sans surprises, qu'il est de bon ton d'adopter, du moins en France, lorsque l'on s'autorise à parler de soi. L'idée générale est la suivante : non, ce n'est pas une autobiographie. Oui, j'ai eu un enfant et cet enfant a eu un cancer, oui je me suis séparée du père de cet enfant, mais tout cela n'est que matière première, le film lui-même est au-delà, le film est création. Ce n'est pas nouveau, c'est même une forme de politesse : qui donc aurait le cran d'affirmer que sa propre vie possède un intérêt supérieur, au point qu'il faille l'exposer aux yeux de tous, pour le plus grand bien ? Hybris, vanité que cela. Il faut donc dire : le hasard a fait que j'ai trouvé dans ma propre vie la matière brute dont j'avais besoin. Mais j'ai transformé, ce n'est pas moi, ce n'est plus moi. Il faut y croire. Lançons pourtant les questions bêtes : si Juliette n'est plus Valérie, pourquoi Valérie joue-t-elle le rôle ? Si Roméo est autre que Jérémie, pourquoi Jérémie ? C'est qu'il joue mal, même, ce couple que l'on est pas censé voir et que tout le monde vient regarder. Ils jouent mal, tous les deux. Le texte sonne faux dans leur bouche, lorsqu'il est sérieux. Seule la plaisanterie semble naturelle, la blague aisée. Comme celle que deux amis un peu bizarres nous feraient de venir à une soirée costumée déguisés en eux-mêmes.


Pourtant, comme s'il fallait à tout prix faire oublier cela, La Guerre est déclarée affiche d'entrée de jeu un parti-pris hyper-créatif qui lui réussit assez bien, la plupart du temps. Décalage entre la bande-son et les images, montages clipesques, fausse pub Nike, roulages de pelles frénétiques et course à pieds dans les couloirs de l'hôpital, tout cela se laisse regarder, somme toute, exception faite peut-être de la-chansonnette-chantée-faux-par-les-acteurs, à laquelle il nous faut asséner un NON ferme et définitif, et un bon coup de pied au cul pour Benjamin Biolay. Tout à son affaire de jonglerie entre rire et larmes, violons et berceuses, déchirements et joies, le film gagne sans doute son pari le plus important : n'être jamais dans le pathos, ni dans la complaisance, quand rien n'aurait été plus simple. Il y a de mauvaises scènes, de grandes faiblesses de rythme, et au-dessus de tout cela des moments admirablement vrais. Comme si à tout mélanger de la sorte, Valérie Donzelli était parvenue à rester à la bonne distance de l'histoire et d'elle-même, ni trop loin, ni trop près.


Et cependant, tout cela me tracasse. Le pari est gagné, mais à quel prix ? A l'échelle des scènes, la course à la distance exige que l'on écarte la question du goût. Lorsque les parents, la veille de l'opération, passent de l'angoisse au fou rire en accumulant les séquelles possibles, et en dressant le portrait d'un fils "aveugle, sourd, nain, pédé, noir et votant FN", la salle rit, mais tard. Qui oserait dire à Valérie Donzelli que tous les moyens ne sont pas bons pour vaincre, quand il s'agit de l'enfant ? Qui pourrait croire vraiment à toute l'histoire de la matière brute, et de la non-autobiographie ? Parce que cette histoire-là était sa vie, elle semble avoir sur elle tous les droits, même celui du mauvais goût. L'enfant est trop jeune, les parents portent tout. Comme le film, la guerre vécue contre le mal est une affaire de traduction : il faut dire et redire ce cancer, dans le rire, dans les larmes ou dans un souffle, jusqu'à ce que le mal cesse. Qui osera dire à Valérie Donzelli qu'elle fait mal, qu'elle en fait trop ? C'est son enfant. Voyez le générique.

Noémie

20 septembre 2011

Ô, David O. Russell

A Mauvaises Langues, quand on enchaîne les posts d'images, c'est que ça ne va pas très fort. Et quand ça ne va pas très fort, rien de tel que I <3 Huckabees, haillon filmique d'exception, tout en loques et morceaux déchirés par la très-fameuse colère du Fighter David O. Russell. Mais comme Rambo qui ne cherche que de l'amour, il n'y a rien de plus doux qu'un sanguin qui s'apaise.


* * *


Avec
I <3 Huckabees, de David O. Russell (2004).

9 septembre 2011

Blood on the Dancefloor (Part Two)

Des armes (et une petite musique d'ambiance)


Saurez-vous les reconnaître ?








Noémie


Réponses : Sweeney Todd, Sin City, American Psycho, Dracula, 12 Angry Men, Reservoir Dogs, Interview with the Vampire.

1 septembre 2011

Aphorismes pour Melancholia


Après avoir vu Melancholia au Max Linder, nous nous sentons investis d'une mission divine qui consisterait à écrire longtemps pour expliquer pourquoi nous n'y avons vu qu'un petit flocon en comparaison de la boule de neige annoncée ; cependant l'envie, le temps nous manque (c'est septembre, très-malheureusement). On aurait aimé que Melancholia soit l'anti-Tree of Life, mais cela a surtout à voir avec les quelques plans cosmiques. Malick parle mieux de la joie que Von Trier de la mélancolie, tandis que, là où le premier ne reculait pas devant un peu de beauté, le second s'empresse de renier (il paraît que c'est son hobby, à Von Trier, de renier) le début de son film pour faire du godme, j'ai fait un lapsus, tant mieux.

* Il y avait plus de mélancolie dans le seul plan de Marie-Antoinette où Kirsten Dunst quitte Versailles au lever du soleil, que dans tout Melancholia.

* Spiderman 2 + 2012 + Dogville = Melancholia

(dernier plan de Spiderman 2)

* Ils auraient donc pu donner le prix d’interprétation à Kirsten Dunst pour Spiderman (moyennant un peu de sexe dans la toile).

* Même métaphorisée, la fin du monde de Melancholia n’a rien à voir avec la fin des vacances avant la rentrée (pardon)

* Cinq minutes de début, cinq minutes de fin, un travelling aérien et des seins : rien qu'un Hollywoodien pur et dur n’eût pas su faire.

* Lars Von Trier tente le remake de Rachel se marie, et rate. Ils auraient donc pu donner le prix d'interprétation à Anne Hathaway (moyennant un peu de sexe derrière l'église).

* Topos de l’été : la mariée se soulage dans sa robe (Maya Rudolf dans Bridesmaids [Mes meilleures amies])

* La polémique sur Hitler visait à combler le vide.

* Films d’après dépression : Le Complexe du Castor, Melancholia, ou comment retrouver le devant de la scène en apparaissant sans maquillage et en chougnant beaucoup (Mel Gibson, Kirsten Dunst).

* Cela dit, je suis bien content que Kirsten Dunst ait considéré que la scène de nu était nécessaire à l’histoire (quoique je n’en sois pas convaincu du tout).

* Le début sert surtout à nous montrer à nous, pauvres spectateurs, comme les images numériques sont laides, comme le vrai cinéma ne vient qu'après, avec les visages et le flou : ce qui nous rend Von Trier plus antipathique que quand il fait l'andouille en conférence de presse.

* « Un monde sans ficelle serait le chaos » (La Souris, G.Verbinski) : la mort de Kiefer Sutherland sert à composer le dernier plan, rien d’autre.

* Le marié n’est pas mal (Alexander Skarsgård, vu dans True Blood).

* Ces seins !

* Ridley Scott aussi aurait pu passer le même morceau de Wagner pendant tout Hannibal (l'ouverture de Tristan & Isolde), mais il a demandé à Hans Zimmer de composer une bande-originale complète.

* Pourtant les larmes de Charlotte Gainsbourg, versées sur l'humanité et des milliers d'autres choses, font de Melancholia, entre autres trouvailles épiques, un objet extra-ordinaire. Une sorte de Passion des anonymes. Il y a aussi ce travelling aérien, au-dessus de la brume et de chevaux galopant sur une route grise ; mais la musique lui colle une beauté facile. Quelques belles trouvailles, oui : un visage impassible devant la fin du monde ; un mariage qui se passe bêtement mal ; une musique qui revient en boucle, comme un mélancolique peut être obsédé par une Ouverture qui ne donnerait jamais d'œuvre complète, en somme : un art du ratage appliqué à l'ensemble du film.


C'n'N